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              Le roi des salauds

                              
C'est la retransmission télévisée des JO de Los Angeles, en 1984, qui enracina en moi, à 24 ans, un esprit critique de la société étasunienne.
Peu s'en fallait que le réalisateur US ne transmette que des images d'athlètes de son pays. Le reste du monde -le monde- n'existait pas, ou n'existait que comme faire-valoir.
Un talent étranger se voyait systématiquement rabaissé, voire nié, spécialement quand cet athlète se trouvait par malheur en compétition avec une star de la bannière étoilée.
                              
Ainsi d'une gymnaste bulgare, extraordinaire de souplesse et de grâce.
Cette jeune fille nous faisait accéder, par des transports d'enthousiasme, à un monde merveilleux, d'une beauté féerique.
Le déploiement sans faille de ce talent enchanteur sublimait la condition de l'espèce humaine toute entière.


A juste titre, les juges olympiques l'avaient excellemment notée, d'un 9,9 sur 10 quasiment impossible à dépasser. Mais sétait ensuite présentée la gymnaste étasunienne, Mary Lou Retton. Une boule d'énergie, de pugnacité. Laquelle avait exhibé, les mâchoires tendues d'une volonté obsessionnelle, un numéro dénué de charme, tout de rage arrachée, de brutalité hâchée.
Peut-on savourer une viande toute de nerfs? Oui, pour le public étasunien, jusqu'alors assoupi, mais qui s'était réveillé comme un seul porc pour trépigner, vociférer, hurler son soutien bestial à son transfert phallique.

Le spectacle en lui-même ne l'intéressait nullement :
Seule comptait la place de numéro un, dévolue d'office, le croit-il, aux Etats-Unis.
La porcherie s'était montrée incapable d'apprécier, l'esthétisme, la délicatesse de la championne bulgare. Que cette dernière n'eût-elle jouie, pour sa renommée, de la nationalité étasunienne!
                              
Public de gros cons, de fous, de tarés.
Les juges avaient gratifiés Mary Lou Retton d'un 10 sur 10 scandaleux, sous les hourras de la canaille. Odieuse pour la jeune bulgare, pour son équipe, ses proches, son pays, cette décision était un crachat à la beauté de l'humain, envoyé à la figure du monde entier.
Révoltant d'injustice; affligeant de stupidité; et dangereux pour la planète entière, vu la puissance des Etats-Unis.



Rebelote aux JO de Sydney.
On aurait pu croire qu'après la grossière magouille d'Atlanta, accorder les JO du centenaire non à Athènes mais à Coca-Cola (douze ans seulement après LA, les Jeux sont décernés une nouvelle fois au même pays), les voyous du CIO auraient mis en veilleuse leur tempérament  d'escroc, par trop ostentatoire. Naïveté d'honnêtes gens.

Loin d'être un aficionado de télévision, le hasard me trouva devant le poste lors de la retransmission de l'épreuve de natation synchronisée. Je n'avais jusque là jamais assisté à ce sport nautique, dont beaucoup disent le plus grand bien; c'était là l'occasion de m'instruire; je la saisis.
                              
En premier lieu, l'équipe féminine de Chine. Parfaite. Enfin, parfaite dans le genre, parce que la natation synchronisée, bonjour les robots. Mais parfaite, donc, techniquement, esthétiquement.
Aucune faute dans l'exécution d'un spectacle d'abord viril, martial, presque heurté,
puis beaucoup plus gracieux, voluptueux, floral. Une allégorie de l'évolution de la Chine ? D'un communisme pur et dur, d'une marche militaire austère à une société
qui se veut plus épanouie? 9,7 sur 10 à mon avis, pour ce tableau impressionnant
de grandeur, de puissance, de perfection technique, d'inventivité et de grâce chorégraphiques. Pas 10 sur 10, parce que la grâce intérieure n'est pas là.
La première place leur est adjugée. Bien.
                              
Puis vient, juste après, l'équipe des nageuses US. Ce qui, déjà, ne laisse pas de m'évoquer LA...

Techniquement très fortes, elles aussi... Quoique leurs grands sourires plaqués comme un rictus du début à la fin de leur numéro soient d'un faux...Le "fuck smile", disent délicatement les anglo-saxons. Mais surtout un spectacle grotesque, brutal, hâché, sans queue ni tête.
Des bébés qui barbotent bruyamment dans l'eau du bain; bêtement, car ce n'est plus
de leur âge, on est gêné pour eux. Une succession de battements vigoureux, de claques violentes, de coups d'autant plus stupides qu'ils font jaillir en permanence de gros bouillons d'écume.Lesquels camoufleront de bout en bout du spectacle la chorégraphie.
Ou l'absence de chorégraphie?

                              
Comment noter un show qui se cache, volontairement subodorais-je ? Par charité, je leur accordais 6,9 sur 10. Eh bien, comme à LA, les juges les gratifièrent de la première place, malgré l'époustouflante réussite chinoise.
L'affront à l'humain se répétait, en l'absence de tout public US  pourtant.
                              
Alors ? Echange de "bons" procédés entre les nations les plus puissantes de l'olympisme? Je te surnote tes nageuses, tu surnotes mon kangourou?

On peut supposer que ce n'est pas une entreprise brésilienne ou slovaque qui parraine cette équipe, mais une firme étasunienne. Pas directement peut-être, le big business US a associé l'image de ses compagnies aux équipes de sport de son pays.
Pour quelle raison, les plus grandes entreprises d'informatique, d'articles de sports,
de rafraîchissements, sont-elles présentes ici? Pour le sport?
Ou pour accroître leur part de marché, notamment aux USA?
Ces grandes entreprises ne doivent-elles pas montrer à leur public qu'elles sont numéro un mondiales, par l'intermédiaire de ces équipes? Ou plutôt, ces firmes qui montrent aux étasuniens qu'ils sont les plus forts du monde en basket, en athlétisme, au golf et que sais-je encore, n'accroissent-elles pas leur image de marque par ce biais auprès de leur public?

Dès lors, comment vendre sur le marché US si un athlète mozambicain remporte le 100 mètres? Comment rentabiliser les investissements colossaux de ces boîtes, desquels répondent de leur emploi les dirigeants, l'achat de leur prochaine résidence en Floride, leur prise de bénéfices sur des stock-options à valoriser, la nouvelle rivière de diamants de leur pétasse conjointe, si un athlète marocain remporte le 400 mètres?
Mauvais pour le business, celà, très mauvais.
                              
Naturaliser ces athlètes d'exception avant les Jeux? Doper les athlètes US?
Influencer lespouvoirs sportifs? Jouer sur tous ces tableaux? Comment croire que des investissements de centaines de millions de dollars puissent souffrir bêtement le risque du sport?


Il n'y a pas de place possible ici pour le hasard. Celui-ci doit être éliminé.
Alors on dope l'athlète étasunien. N'est-ce-pas Flo-Jo, star de Séoul 1992, morte d'un
mystérieux arrêt cardiaque à 38 ans, et dont l'autopsie s'est vue interdite par les autorités US?
Bizarre que l'épreuve phare des JO, le 100 mètres hommes, soit toujours dévolu à un étasunien. Ben Johnson, vainqueur de cette épreuve, à Séoul là encore, avait déclaré quelque chose dans ce sens, qu'il avait été disqualifié pour dopage car il était canadien, et non étasunien (cette nation US se reconnait dans le 100 mètres, cette courte distance, car elle ne voit pas plus loin que le bout de son nez, l'exercice semestriel de l'entreprise, la prochaine élection présidentielle, etc...).

Comment se fait-il qu'aucun athlète US ne soit disqualifié pour dopage, au contraire
de vulgaires roumains, bulgares et autres turcs, par fournées entières ceux-là?
Les athlètes US aiment à se réclamer de Dieu : "Il m'aide toujours", disent-ils.
A camoufler le dopage? A l'image des bouillons d'écume de nos pétasses qui, loin de camoufler la corruption des juges, la révèlent?
                              
Le dopage des athlètes étasuniens, secret de polichinelle, ne suffit pas à assurer la première place : c'est que les autres se dopent aussi, presque tous.
Comment vendre les JO si aucun record ne tombe, si rien ne se passe?


Alors? Comment éliminer le hasard de la compétition? En influençant les juges?
Quel pourcentage du budget relations publiques de ces boîtes leur est-il dévolu ?
Ne seraient-ils pas dopés au dollar? C'est là la seule explication rationnelle possible
à leur comportement irrationnel.
Les arbitres de l'olympisme jugent-ils la quantité de dollars qu'ils ont reçus ?
                              
Le dollar préside à la destinée des Jeux. Il écrase le monde, le pervertit.
Il s'introduit en tous lieux, dans les moindres recoins de la société.
Il s'immisce partout, au plus profond de l'humain. Il est le roi des salauds.
Il dirige le monde.
                              
                              
                                                       François Dor,
                                                         Provence,
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